L’ouverture de SHEIN à Paris : fast‑fashion, files et … procédures judiciares
Ah, Paris ! Ce sont les ruelles pavées, les cafés qui sentent bon le croissant, les vitrines élégantes… et désormais un nouveau concurrent qui débarque en hurlement de néons : SHEIN. Le célèbre géant de la « fast‑fashion », jusque‑là surtout en ligne, a décidé de poser ses cartons dans le très chic BHV Marais, en plein centre de Paris, le 5 novembre 2025.
Une ouverture « tranquille », si l’on omet la police et les banderoles
Pour fêter ça, SHEIN n’a pas lésiné : des files d’attente interminables s’étiraient rue de Rivoli, les curieux guettaient l’entrée, et au passage, les CRS surveillaient de près, parce que oui, l’événement avait autant d’ambiance que la première semaine des soldes… en pire.
D’un côté, des chasseurs de bons plans, de l’autre, des manifestants brandissant des pancartes « Shame on SHEIN », « Fast fashion kills craft ». Une mise en scène presque hollywoodienne pour un lancement de magasin.
« Bonjour Paris, voici nos prix mini… et nos soucis maxi »
Oui, parce que pendant que la marque ouvrait joyeusement ses portes, en même temps, la France annonçait une procédure de suspension de la plateforme en ligne pour non‑conformité à la loi : une liste de produits douteux, dont des poupées sexuelles à l’apparence enfantine, avait été repérée sur le site. Coïncidence ? Peut‑être. Ironie ? Assurément.
Le message était clair : « Venez faire vos achats, mais on garde un œil sur vous. »
Le modèle : ultra‑discount, ultra‑examens
SHEIN s’est spécialisé dans le « très bas prix », les renouvellements rapides de collections, la mode « jetable » presque avant même d’avoir été portée. La marque afiche une ambition : séduire les jeunes, les accros du tout‑tout‑tout vite. Mais voilà : ce modèle provoque un mécontentement croissant parmi les créateurs, les artisans, et même les autorités françaises qui voient dans ce type de concurrence une menace.
La terre de la haute couture, des ateliers soignés, des façonnements à la main, observe donc l’arrivée d’un bulldozer de prix bas avec un mélange d’amusement et d’horreur.
Un vrai coup pour le commerce traditionnel ?
Le propriétaire du BHV, Société des Grands Magasins (SGM), affirme que cette arrivée vise à « rajeunir » le magasin et attirer une clientèle plus nombreuse.
Mais derrière ce discours, certains commerçants locaux et marques françaises ont déjà quitté les rayons, refusant d’être associés à ce qu’ils considèrent comme « l’anti‑mode » ou « l’anti‑artisanat ».
Humour noir ou mode éclair ?
Si on devait résumer l’arrivée de SHEIN à Paris en une image : imaginez un buffet à volonté, on vous invite à remplir votre assiette à ras bord, mais juste à côté, on vous rappelle que le buffet peut fermer si vous prenez trop rapidement.
Le magasin permanent à Paris, c’est donc la vitrine d’un modèle qui a jusqu’ici fonctionné en ligne à toute vitesse, mais qui fait face à la réalité d’un marché français très tatillon, très attaché à des valeurs différentes : travail, environnement, savoir‑faire.
Pourquoi SHEIN fait grincer des dents
Les critiques envers SHEIN ne se limitent pas aux prix bas ou à l’arrivée du magasin à Paris. La marque est régulièrement pointée du doigt pour son modèle de « fast fashion » qui favorise une production massive et rapide, souvent au détriment des conditions de travail dans ses ateliers et de l’impact environnemental.
Les vêtements, conçus pour être consommés rapidement et jetés encore plus vite, génèrent une énorme quantité de déchets textiles. De plus, certaines polémiques concernent la contrefaçon ou la reproduction non autorisée de créations de designers. P
our beaucoup, SHEIN incarne le côté sombre d’une mode ultra‑accessible : attractive sur le moment, mais problématique à long terme pour la planète, l’éthique et l’artisanat local.
Procédures judiciaires
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Le DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a mené une enquête qui a abouti à une amende record de 40 millions d’euros pour pratiques commerciales trompeuses (notamment fausses réductions de prix) en France.
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Le gouvernement français a annoncé l’engagement d’une procédure de suspension de la plateforme SHEIN en France « le temps nécessaire pour que la plateforme démontre que l’ensemble de ses contenus soit enfin en conformité avec nos lois et règlements ».
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Une enquête européenne est en cours : la Commission européenne a ouvert une enquête sur SHEIN pour des suspicions de non‑respect des règles en matière de protection des consommateurs, de contenu illégal ou de pratiques commerciales trompeuses.
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Un signalement a été fait auprès de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) concernant des possibles irrégularités de lobbying liées à SHEIN en France.
En résumé
L’ouverture du magasin SHEIN à Paris, c’est un peu comme inviter un sprinteur dans une course de fond : tout le monde regarde, certains applaudissent, d’autres s’inquiètent pour le tapis rouge. Entre files d’attente interminables, critiques sur la fast fashion et scandales en ligne, SHEIN montre qu’il sait attirer l’attention… et la polémique.
Que vous soyez tenté par les prix mini ou amusé par le spectacle, une chose est sûre : la capitale vient d’ajouter un nouveau personnage coloré à sa scène déjà bien animée.
